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6'72 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

bavardages en marge de la peinture, le succès de cette insurrection salutaire ; nous donnerions ainsi à M. E. Bernard l'occasion de nous diminuer. Avouons qu'il n'est rien, dans tout ce que l'on tenta durant ces vingt dernières années, qui ne trouve dans Cézanne son point de départ et encore, parfois, sa solution anticipée. Ceux qui parmi nous eurent le sens créateur le plus étendu ne firent que souligner les intentions les plus secrètes du Maître, et donner plus de liberté à ses gestes dont d'ex- cessives pudeurs restreignirent souvent le jeu. Le droit du peintre à disposer librement des objets pour recons- tituer et rendre sensibles à autrui les architectures mentales nées de sa sensation est affirmé avec violence par tous ceux qu'anime un esprit nouveau. Il est possible que les résultats jusqu'ici obtenus par les méthodes récentes de travail ne vaillent pas ceux dus aux méthodes anciennes. Mais — encore que le nouvel art n'en soit qu'à ses débuts — les jeunes peintres, en répondant de leur mieux à la question posée par Cézanne ont rempli leur devoir. Que ceux qui les blâment cessent donc de répondre inlassa- blement à de séculaires questions qui ne se posent plus et trouvent, s'ils le peuvent, à la dernière posée une. solu- tion plus juste que celle des cubistes — ou encore, s'ils s'en sentent la force, et si une telle entreprise est pos- sible, qu'ils soulèvent une nouvelle inquiétude. Jusque- là j'affirme qu'il n'est pas d'idéal artistique capable d'exciter davantage les facultés les plus poétiques et les plus généreuses de l'esprit humain.

ANDRÉ LHOTE

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