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NOTES 217

Et tendrement le détruil. Et la langueur irisée Des arpèges, des accords, Descend, tranchante et rusée, Dans la faiblesse du corps Et dans l'âme divisée...

                                  JEAN SCHLUMBERGER 
                       * * *

LA FABLE DE POLYPHÈME ET DE GALATHÉE,

poème de Gongora, traduction française de Marins André (Garnier).

Nest-ce pas à M. Francis de Miomandre que le nom de Gongora doit de briller d'un nouveau lustre, après un injuste discrédit ? Reprenant un parallèle esquissé par Rémy de Gour- mont dans ses Promenades Littéraires, il publia, dès juillet 1918, dans Hispania, une étude sur Gongora et Mallarmé.

Le gongorisme de Gongora, comme le marivaudage de Marivaux, serait-il un de ces mythes dont les auteurs de manuels entretiennent le culte paresseux. Ce poème le laisse à penser. On n'y trouve guère d'afféterie ni de préciosité, mais de l'enflure et le goût des images rares. Cordouan comme Lucain, il ne prodigue pas moins généreusement que lui l'or- nement et les brillants. Les strophes de ce. poème ressemblent à de belles conques nacrées et chatoyantes oia l'on entend la rumeur de la mer et le chant des sirènes...

Voici Cérès

Sur un char qui ressemble aux herses estivales

et la Sicile

Coupe de Bacchus, jardin de Pomonc

Gongora, pour décrire l'antre de Polyphème, rencontre un trait sublime, digne d'Homère :

Ce formidable baillement de la terre.

La plainte de Polyphème, par son ampleur et son majes- tueux déroulement, rappelle l'Ode à Michel de l'Hospital de Ronsard.