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350 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

xviii«, xvii<:, xvF et xv« siècles sont bien distincts, et dans le XVIII* siècle on distinnaie clairement dans la vie politique, l'art et la littérature trois générations qui offrent entre elles des airs de famille. » Peut-être distingue-t-on clairement tout cela dans l'idée qu'on s'en fait, dans le morcelage artificiel qu'on établit, plutôt que dans la réalité. Les coupures ne sont pas les mêmes pour les divers pays. L'unité du xvii» siècle consiste en partie dans l'ombre projetée que fait sur lui la personne de Louis XIV, l'unité du xviii* siècle dans celle de Voltaire, et la carrière de Victor Hugo ne nuit pas à celle du xix«.

Cette tendance qui porte M. Mentré à réaliser la génération comme un être au lieu de la suivre dans son mouvement se retrouve ailleurs. « On va répétant, dit-il, que la flimille est la cellule de la société. L'autorité d'A. Comte ou de Le Play ne saurait garantir l'exactitude de cette comparaison. La cellule sociale est l'individu adulte. La famille est le réservoir qui ali- mente tous les organismes superposés. Elle remplit une fonc- tion analogue à celle des organes hématopoiétiques (foie, rate, moelle osseuse), qui fabriquent les globules sanguins. » Famille ou adulte, le seul fait d'employer le mot de cellule sociale, qui apparaît de plus en plus dépourvu de sens, ramène de vieilles erreurs; le fait social n'a pas plus d'analogue physique ou biolo- gique que le fait psychique, et nous trouvons là simplement une expression de la tendance naturelle à réaliser en chose ce qui n'est pas une chose.

��Il y a un curieux contraste entre l'obscurité relative où sont restés les penseurs qui élucidèrent avant M. Mentré l'idée de génération, Dromel, Ferrari, Lorenz, et l'emploi de plus en plus général que les littérateurs et particulièrement les critiques ont fait de cette idée. Elle est au fond un héritage du romantisme, une des idées justes et définitives qu'il ait apportées. M. Mentré ne cite pas le nom de Stendhal. C'est pourtant sur la différence des générations qu'est bâtie dans Racineci Shauespeare sa définition du romantisme, et le Rouge et Noir est avant tout la psychologie d'une génération d'Epigones, d'une âme née dans le rayonne- ment napoléonien et à laquelle manque le milieu napoléonien qui lui eût permis de réaliser sa vie. Julien Sorel échoue sur

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