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NOUVELLES LETTRES DE STENDHAL 403

Stendhal n'aime point l'argent pour lui-même, en avare, comme un paysan ou comme un bourgeois. Il est encore plus incapable, si par hasard il en possède, de l'étaler gros- sièrement, à la façon d'un Balzac. Ce n'est pas lui qui emplirait de ses comptes, de ses dettes et de son luxe, les lettres à sa maîtresse.

Pourtant, comme tous ceux qui ont des goûts délicats, Stendhal aime l'argent, seul moyen de les satisfaire. Ses lettres à sa sœur et à son beau-frère sont toutes pleines de calculs et de chiffres.

Mais Stendhal, même quand il fait son bilan, garde son âme de poète. Il bâtit, dans le rêve, sa fortune comme ses amours ; de chimériques hypothèses lui font ensemble espérer une maîtresse sublime et les plus copieux revenus. Et c'est ainsi qu'il se prépare, en fait de femmes ou d'argent, des désillusions parallèles.

Car Beyle, par la faute peut-être de son père (d'où sa haine féroce contre l'homme qui a tué tout l'infini de ses espérances : crime inexpiable, pour un rêveur), Beyle, malgré son imagination féconde, ne réussit point à faire fortune. Ce n'est pas faute du moins de combinaisons variées. Nous pouvons les suivre, au long de ses lettres, et en apprécier le succès. Il nous est ainsi permis de com- parer, pour la première fois, les projets de Beyle, et ses rentes.

Le 17. mars 1805, il expose à Pauline un de ses plans. Il va se faire banquier et s'associer son ami Mante : « Me voilà, ma chère amie, avec la perspective du plus bel état. Si nous vivons encore 40 ans l'un et l'autre, nous aurons 100.000 francs de rente chacun... » Dix ans plus tard, il avait 37.000 francs de dettes, et, pour les payer, de chan- celantes combinaisons.

A la vérité, nous savions déjà que Beyle n'était point devenu un capitaliste, mais nous croyions du moins qu'au temps de sa plus haute fortune, quand il était auditeur au Conseil d'Etat et inspecteur des b%iments de la Couronne,

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