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MARS OU LA GUERRE JUGÉE 533

une longue expérience, n'admet point du tout l'engage- ment résiliable, ni même à terme. Disons avec les hommes du métier, recruteurs ou médecins, que si l'homme était laissé juge de ses propres forces, et de ce que la Patrie peut lui demander encore, les effectifs fondraient, comme on dit.

Il faut être juste là-dessus et ne point déformer la nature humaine, d'aucune manière. Il y a certainement des hommes qui retournent volontairement au danger, par un souci de vaincre la peur, et aussi par cette idée si puissante qu'il n'est point juste de laisser à d'autres, qu'ils soient libres ou forcés, le poids des plus lourds devoirs. Il est un plus grand nombre d'hommes qui, dans les moments où ils sentent plutôt leur propre force que le danger, sont capables de refermer la porte de l'arrière, dans le temps très court où elle s'ouvre. Enfin le besoin de mépriser est bien fort chez l'esclave. Et surtout la longue suite des prières, des intri- gues et même des mensonges qu'il faudrait mettre en jeu pour faire considérer les raisons même les plus légitimes a quelque chose de rebutant et d'ignoble aux yeux d'un homme libre. L'œil d'un médecin militaire, toujours armé contre la ruse, suffit presque toujours pour achever la gué- rison.

Mais toujours est-il qu'un noble chef, et qui voudrait croire à ses propres pensées, dirait du premier mouvement : « Que ceux qui en ont assez s'en aillent ; je ne veux que des héros. » Mais il est clair qu'il ne peut point dire cela. C'est pourquoi le chef militaire vit dans l'apparence, sans pensée aucune sur les choses que je dis maintenant ; sans gloire réelle au dedans ; ramenant tout au métier ; cordial sans aucun naturel ; inflexible et triste.

��DE L'IRRESOLUTION

Les mouvements de l'homme vont par explosion, tou- jours au delà des causes extérieures. Il est fou d'expliquer

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