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NOTES

��LE BUCHER SECRET, par Joachim Gasqiiet (Librairie de France).

Avec Joachim Gasquet disparaît l'un des derniers romanti- ques, l'un des rares poètes qui aient nourri, au lendemain du symbolisme, l'ambition d'être le poète pour tous, « comme Vic- tor Hugo ». Et c'est bien au Victor Hugo des Chants du Crépuscule et des Contemplations que l'on songe en lisant les poésies du Bûcher secret, si l'on n'y retrouve pas cette noble aisance dans 'le lieu commun qui séduit le lecteur moyen. En dépit, ou peut-être à cause de l'abondance verbale, le pessimisme orageux et pas- sionné en est un peu monotone et ce perpétuel état de transe ne laisse pas de paraître souvent affecté et théâtral. Non que Gasquet ne fût sincère : au contraire il avait la passion de la sincérité ; ou mieux, il était sincère avec passion, c'est-à-dire d'une manière qui met en défiance. Ses alexandrins ont volontiers l'allure du théâtre, ou bien le type des « beaux vers à dire » et ce genre-là a cessé d'émouvoir pour un temps. Non pas qu'il faille faire fi de l'éloquence, certes non, mais les points d'exclamation, l'interrogation et l'apostrophe ne sont pas l'éloquence même ; un discours véhément peut étourdir l'âme, sans la toucher. Sans doute « il y a une volupté dans la douleur » et, surtout après Baudelaire, il n'est pas malaisé de la découvrir et de s'en donner l'amer divertissement ; mais ce n'est pas dans le Bûcher secret qu'il en faut chercher l'expression saisissante ou neuve : des images à profusion, des images qui trahissent le procédé, non de celles qui sont des jaillisse- ments de la pensée mais d'ingénieuses fictions que les « fins diseurs » monteraient volontiers en épingle :

Elle (la Fai-ii) dort opuletite et rousse... à ses doigts les rus, sous la mousse ôteiit et passent leurs anneaux.

Il y a çàetlà, dans le lyrisme de Gasquet, des traces de Rostand.

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