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LE TRIPTYQUE DE M. ABEL HERMANT 27 1

lectuelle exotique vers 1900, avec sa fatigante intelligence qui ne désarme jamais, son irritante adaptation immédiate à toute chose, sa « connaissance de notre littérature » qui consiste à ignorer maint de nos phénix cependant que tel oisillon de chapelle lui est familier. — Les randonnées de Philippe, en Allemagne, en Grèce, en Pologne, pour rejoin- dre la vagabonde Zosia, sont l'occasion des plus heureuses descriptions, encore que l'auteur, vrai disciple des anciens, nous peigne moins les choses que leur réaction sur les âmes ; j'aime, entre d'autres, cette page où Philippe, dans une petite ville de Posnanie, découvre que l'Allemagne est plus alle- mande, le matin, quand elle fait son marché ; cette autre où il retrouve dans l'architecture du château de Zosia l'âme de la polonaise, si différente de la sienne qu'il « ne pouvait l'admirer que jusqu'à la passion, non jusqu'à la sympathie. »

Retenons cet hommage à la sympathie. Il s'apparente à un trait qu'on n'a pas assez fait ressortir chez notre auteur, encore qu'il soit remarquable chez le peintre terrible et comme diabolique de tant de vilenies et de convulsions : le bonheur de modeler, à l'occasion, une âme noble et sereine, un être d'équilibre et de paix. Ce trait, qui s'aperçoit déjà, par exemple, dans le portrait de Madame Morand-Fargueil du Joyeux garçon, paraît ici dans celui de Madeleine, la femme de Philippe, avec ses yeux gris « qui se reposent à loisir sur les objets et sur les âmes », toute sa personne qui exprime « la compagne dont le cœur est sûr. » L'auteur enveloppe cette exquise créature dans la même caresse où Balzac berce Madame Firmiani et Thackeray Amélie Osborne. Une fois de plus, on se dit que tous les Satans n'aiment qu'Eloa.

Aussi bien M. Hermant — rappelant par là encore son frère en satanisme Thackeray — peint avec un bonheur tout spécial le charme des familles unies, la poésie des foyers purs. Souvenons-nous, dans la Discorde, des vieux Lengellier. La nouvelle œuvre présente en ce sens deux

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