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Ame-et-corps sans biens
Ils abordaient un soir
Ainsi que des marins au port de la mort.
En étreignant étroitement dans leurs bras
Le pauvre mat de leur destin
Chu sur eux de tout son long
Comme un arbre scié,
Et la voile blanche de leur âme
Désormais repliée,
A la proue, leurs pieds harasses,
A la poupe, leur tète renversée,
— Elle autrefois, le gouvernail de la pensée —
Et pareil au mitan épanoui de la coque
Plus large et plus lourd en même temps,
Les bras pendant comme une paire de rames.
Les reins, la croupe, la taille.
Tout le milieu enfin du corps, centre et ventre.
Puissant, craquant, pesant comme un sac plein.

Il y a là de la vigueur, de la gravité, une harmonie voilée, un peu grise. En beaucoup de passages, une simplicité familière et virile, des images neuves, bien ajustées à ce qu’elles doivent évoquer. Parfois pourtant le désir d’atteindre à la force conduit J. Portail à l’emploi de termes trop forts, qui dépassent le sentiment vrai et par conséquent l’affaiblissent. On ne maintient pas. sans quelque fatigue, son attention éveillée jusqu’à la 534^ P^g^ du second volume, car la mémoire paresseuse n’a guère de prise sur cette vaste coulée. Mais on serait coupable si l’on n’apportait pas à la lecture à’Androlite la persévérance à laquelle ce livre a droit.

De belles eaux-fortes de Favory ornent le poème et en reflètent bien l’esprit. jean schlumberger

LA VERDURE DORÉE, par Tristan Derême (Emile-Paul).

Dans les poèmes que M. Tristan Derême dispersa en maintes plaquettes et qu’il réunit aujourd’hui en volume, il prend soin de nous avertir que« la tristesse et l’affliction les plus douloureuses n’apparaîtront qu’ornées des claires guirlandes de