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NOTES 75 î

Fuis Vhori7;on bruyant qui toujours te réclame Peur écouter enfin ta vivante rumeur Oue Farde maintenant de ses arcs de verdeur Le palmier qui s'incline aux sources de ton âme.

Il arrive à M. Supervielle de creuser la mine Laforgue, mais les thèmes du Regret et de la Nostalgie sont toujours les plus beaux que puissent fleurir de leur souffrance e* de leur inquié- tude les poètes trop sensibles.

GEORGES GABORY

LE ROMAN

AH ! PLAISEZ-MOI..., par Rem Boyksve (Editions de la Nouvelle Revue Française).

Voyez le charme d'un auteur. Il construit un livre au mépris de toutes les règles, et l'on tremble en songeant qu'il eût pu s'y soumettre. Il nous promet un drame, un crime mystérieux, qu'il est chargé de dénoncer : il nous donne des souvenirs, des portraits, des finesses d'analyse, des aperçus qui nous enchantent. Le crime n'y manque pas, c'est vrai ; on l'avait oublié. Il arrive à la fin, non comme le terme fatal auquel l'auteur a constamment songé, vers l'éclat dramatique duquel il a tendu toutes ses ficelles, mais comme le dernier élément capable d'éclairer « un cas intéressant touchant le cœur féminin » et de faire connaître à quelle extrémité tragique peut se porter une femme incapable et désireuse d'aimer, frappée au seuil de la vieillesse, de la pire déception, muée aussitôt en haine. Ce n'est pas ce crime qui nous intéresse, mais qu'il ait été possible, et comment il l'a été. Il ne se serait rien passé du tout, nous n'aurions pas été déçus. L'action ne converge pas vers ce dénouement, comme vers sa raison d'être ; mais, ce dénouement étant proposé à l'auteur et non choisi par lui, il y trouve prétexte à l'évocation d'un passé dont des lumières nouvelles éclairent tout à coup des coins entrés dans la pénombre, et à ces réflexions ingénieuses auxquelles un mora- hste trouvera toujours plus de prix qu'à la mortelle tragédie qui les a mises en mouvement.

Et, si l'on considère ce livre, non plus comme un roman, mais comme la peinture exacte de l'ébranlement du souvenir.

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