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C’était l’époque où il écrivait le Père Perdrix. Par les beaux dimanches il s’en allait avec ses amis dans la vallée de Chevreuse. Le rendez-vous était dans une petite gare du boulevard Saint-Michel. Pendant que Charles s’informait de l’heure des trains, Philippe attendait sa vieille amie devant la grille du Luxembourg. Elle arrivait en courant à travers le jardin toujours un peu en retard. Michel s’impatientait, ayant peur de manquer le train. Mais Philippe disait en frappant sa canne sur le trottoir :

— J’aime mieux manquer tous les trains que de la laisser toute seule un dimanche.

Aussitôt qu’il l’apercevait, il faisait un signe à Michel qui se précipitait pour prendre les billets. Et tous quatre s’engouffraient dans un compartiment.

Charles-Louis Philippe restait debout près de la portière, pour voir passer les couples d’amoureux qui couraient le long du train, en quête d’un compartiment où ils seraient seuls. Et quand le train s’ébranlait, il s’asseyait, ôtait son binocle qu’il essuyait soigneusement, et quand il le remettait, on ne savait si c’était les verres qui étaient plus clairs où si c’était des larmes retenues qui faisaient briller davantage ses yeux.

Un dimanche il voulut s’arrêter à Lozère où il était venu plusieurs fois avec Marie Donadieu. Quand il voulut s’asseoir sur une grosse pierre en forme de bête où elle avait un jour oublié son manteau, une petite vipère sortit de dessous la pierre. Elle n’était guère plus longue qu’un porte-plume, et pas beaucoup plus grosse. Michel voulait la tuer, mais Philippe l’en empêcha. “ Elle est si petite, dit-il, elle n’a encore fait de mal à personne ”.

La maison aux glycines le rendit rageur. Il se souvenait