Page:NRF 5.djvu/55

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ISABELLE 49

Parbleu ! je m'en apercevais de reste, sans qu'il fût nécessaire de me le signaler. Ce grand gaillard d'abbé, aux yeux vairons,me devint brusquement antipathique.L'enfant ne m'avait pas répondu, mais son visage s'était empourpré. Je regrettai ma phrase et qu'il y ait pu sentir quelque allusion à son infirmité. L'abbé, son potage pris, s'était levé de table et arpentait la pièce ; dès qu'il ne parlait plus, il gardait les lèvres si serrées que celle de dessus formait un bourrelet, comme celle des vieillards édentés. Il s'arrêta derrière Casimir, et comme celui-ci vidait son bol :

— Allons! Allons, jeune homme, Avenzoar nous attend ! L'enfant se leva ; tous deux sortirent. Sitôt que le

déjeuner fut achevé, Monsieur Floche me fit signe.

— Venez avec moi dans le jardin, mon jeune hôte, et me donnez des nouvelles du Paris penseur.

La langage de Monsieur Floche fleurissait dès l'aube. Sans trop écouter mes réponses, il me questionna sur Gaston Boissier son ami, et sur plusieurs autres savants que je pouvais avoir eus pour maîtres et avec qui il corres- pondait encore de loin en loin ; il s'informa de mes goûts, de mes études... Je ne lui parlai naturellement pas de mes projets littéraires et ne laissai voir de moi que le sorbon- nien ; puis il entreprit l'histoire de la Quartfourche, dont il n'avait à peu près pas bougé depuis près de quinze ans, l'histoire du parc, du château... ; il réserva pour plus tard l'histoire de la famille qui l'habitait précédemment, mais commença de me raconter comment il se trouvait en possession des manuscrits du XVII™® siècle qui pouvaient intéresser ma thèse... Il marchait à petits pas pressés, ou, plus exactement, il trottinait auprès de moi ; je remarquai qu'il portait son pantalon si bas que la fourche en restait

�� �