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668 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

me console de toutes ces choses mais je ne m'en console pas bien profondément puisqu'il suffit parfois d'un spectacle pour me ramener d'un seul coup mes vieux chagrins.

��LXII

��23 mai 1900

��Mon ami bien aimé, je t'écris au bureau. C'est un assez vilain jour pour moi parce que je m'en- nuie beaucoup. Je suis dans un moment de crise et c'est bien plus embêtant parce qu'il y avait quelques jours que ça m'avait quitté. Il y a des moments où tout me semble absolument noir et où les vieilles espérances qui font que je vis quand même semblent bien malades. Ça craque terrible- ment aujourd'hui et il suffit d'une femme qui passe, d'un geste autour de moi pour que je l'entende craquer à en mourir. Je ne m'en prends à personne, pas même à mes maladresses et à mon peu de chance, je remonte bien plus haut et je m'imagine que je suis venu en ce monde avec un destin fait de cette manière. Vois-tu, mon vieux frère, si le Bonheur venait me visiter maintenant il serait trop tard. J'ai trop l'habitude de souffrir et le Bonheur ne pourrait que me faire souffi-ir encore. Je t'assure que c'est triste.

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