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NOTES 891

REVUES

Le Mercure de France publie une série de lettres inédites d'Ingres. C'est une correspondance familière où l'on peut retrouver la figure du peintre, mais où l'on ne saurait la découvrir si on ne la connaît déjà. Aucun renseignement sur son art même. Plus intéressante est une lettre adressée à Ingres par son ami Varcollier, car elle indique bien la situa- tion qu'occupait, parmi ses contemporains, l'auteur de V Apo- théose d'Homère.

" Vous vous étonnez, mon ami, et vous vous plaignez tout ensemble, d'être revendiqué par deux écoles, ou plutôt par deux sectes que vous détestez presque à l'égal l'une de l'autre; je veux dire l'école classique ou ennuyeuse, fondée par un homme de beaucoup de talent, M. David, et l'école romantique représentée par M. Delacroix qui n'est encore qu'un homme d'esprit. Je comprends vos doléances et j'y compatis, car vous êtes assurément l'artiste de nos jours le plus étranger à l'une comme à l'autre de ces deux coteries et par vos travaux et par vos doctrines et par votre caractère... En un mot, vous êtes une esî)èce d'épée à deux tranchants qui blesse à droite comme à gauche et dont tout le monde s'empare... Non que chacune de ces deux sectes vous adoptât si elle était véritable- ment triomphante, mais chacune d'elle vous prône pour les qualités qui manquent à ses adversaires, prenant pour une ressemblance avec vous ce qu'elle a de dissemblable avec eux."

Dans le même numéro, des poèmes d'André Salmon, funam- bulesques et mélancoliques. C'est une sorte de carnaval triste où ce poète a bien raison de ne pas craindre une atmosphère et des thèmes désuets, puisqu'il sait leur redonner de la vie par son expérience et son émotion personnelles. D'ailleurs les lucides Salons que ces temps derniers, André Salmon pubha dans Paris-Journal prouvent assez ce qu'il dissimule d'intel- ligence et de conscience sous les caprices un peu tristes et la nonchalance attendrie de sa poésie. 8

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