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LEVY III

A la terrasse de la Rotonde, des messieurs politiques pérorent autour des colonnes de soucoupes en feutre brun; — " le Comité répoublicain, " souffle Davidowitsch.

Ces messieurs, il y en a de toutes les eaux et de toutes les formes ; mais Vhomo politicus de France est d'un type dont l'uniformité a déjà retenu l'attention de la zoologie. Dans le nombre, quelques bonnes têtes qui disent oui quand les Elus ont parlé.

Ils causent tous en même temps, et avancent la bouche par dessus les tables pour bien feire valoir leurs discours, à la manière de tous les messieurs politiques. Un petit nuage bleu d'absinthe leur sort des gencives et sucre l'air qui devient douceâtre et nauséabond comme un sirop tovirné.

— « Hé ? Lévy ! Prah ! "

Le vieux fourreur ne se sent plus de joie. Il défonce à coups de coude les côtes de Valentin Loubatié. Lévy, rouge toujours, a son verre parmi ceux du majestueux Comité. Le petit homme gras est assis tout droit, une canne entre les jambes. Un panama de cent sous a coulé sur sa nuque ronde où un dernier reste d'équilibre le retient. La calvitie a fait tache d'huile dans les cheveux roux, les piqûres de son ont pâli, le faux-col est blanc. Mais c'est bien là le demi sourire silencieux dont le voyageur garde le souvenir immuable.

— " Vice-président, lui, Lévy ! Ça fait rigoler quand on a été du Bundt, hé ? Les temps ont changé, dites, Loubatié ! Vice-président il est, prah ! "

Devant la terrasse où se désaltèrent les annonciateurs de la démocratie, la foule s'agglomère plus dense. Traîné par Davidowitsch, Loubatié se fraye un chemin. Arrivé

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