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128 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

d'assurance s'y manifeste, un choix plus judicieux des rythmes et des mots, et sinon plus d'originalité dans les sentiments et des pensées, ou de hardiesse dans l'expression, du moins une plénitude d'émotion morale et religieuse que nous admirerons sans réserve le jour où, mieux " pressée aux pieds nombreux de la poésie", elle saura, comme dit Montaigne, "s'eslancer bien plus brusquement " et nous ébranler ainsi " d'une plus vifve secousse ".

HEBBEL, SA VIE ET SES ŒUVRES, (1813-1845) par A. Tibal. (Hachette).

Cette étude, limitée aux années de formation, contient tout ce qu'il est utile de savoir sur la genèse du talent poétique de Hebbel.

Les travaux de Kule et de F. M. Werner étaient purement biographiques. Celui de Scheunert n'envisageait que l'esthé- tique de Hebbel. M. Tibal ne veut pas faire violence à la pen- sée de Hebbel " en systématisant ce qui chez lui est incohérent, en donnant un sens profond et définitif à ce qui souvent, n'est que métaphore ". Tout en reconnaissant que la poésie de Hebbel n'est point naïve, "qu'elle se complique de pensée et de spéculation", il déclare à bon droit que la poésie est l'es- sentiel, et tente une restitution intégrale de l'individualité du poète jusqu'en 1845.

Avec une érudition imperturbable il reconstitue le milieu de Hebbel. Il semble que nous sachions désormais où trouver tout ce qui aide à comprendre les trente premières années du poète. Race, famille, tempérament, relations, voyages, lectures, influences diverses, tout est étudié avec une méthode prudente et patiente, sans souci des lecteurs frivoles. M. Tibal n'ignore rien du sujet ni de ses alentours.

Il ne nous en laisse non plus rien ignorer. Sans que la lecture des 700 pages de son ouvrage cesse jamais d'intéresser, l'auteur témoigne pour l'art de la composition d'une indifférence qui étonne d'autant plus qu'on la sent très consciente. Pourquoi

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