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PAYSAGES DE LA TRENTIEME ANNÉE 333

— " Nel mezzo del cammin di nostra vita " —

de quel poids non usé ces paroles tant répétées me retombent sur le cœur. Le milieu de notre vie. Le milieu est une sorte de fin. C'est la moitié de la fin, la fin du commencement, le moment que pour s'éveiller attend la conscience. Et voici qu'elle bruit de toute part, et tous mes efforts n'arrivent pas à la faire taire. Eh bien donc, qu'on l'entende!... Elle m'accuse d'avoir su d'avance que ce chemin facile n'était pas le vrai chemin, cette certitude de mes trente ans, de l'avoir eue au fond du cœur depuis toujours. Impitoyablement elle déroule devant moi un paresseux passé, où je ne sais plus, dans les événements qu'elle me reproche, démêler de la mienne la part des contingences. Je suis devant moi-même comme un spectateur impuis- sant et torturé : pour la première fois de ma vie, je comprends l'enfsr catholique : la brûlure sans but et sans fin...

Malheur à qui témérairement escompte l'avenir: tout présent lui est enlevé, il court après sa vie sans la saisir jamais.

O routes imaginaires ! Tandis que la vie pas- sait, rapide, devant ma porte, je l'attendais, lan- goureusement serré à la vitre des paysages rêvés. A la place des aspects incohérents et grandioses que je prévoyais, j'aperçois mon horizon réel, morne, médiocrement vallonné, d'où je ne puis

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