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I062 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

comme par un grand coup de filet qui nous ravit et qui nous entraîne, Lamartine et Victor Hugo nous donnent souvent cette impression de magnifique et enivrante captivité.

" Mais à tel moment aussi, cette sinuosité et cette fuite du sentier sous les ombres — Virgile a connu ces prestiges — nous séduit aussi singulièremeut, avec ce sentiment d'incertain et d'indécis, et d'application qu'il nous faut pour nous retrouver et bien plutôt encore pour ne nous perdre qu'à demi, sembla- bles à celle que Vigny chantait et qui se plaisait à suivre un entier effacé. "

Certes, nous ne pouvons demander à M. Faguet qui résiste au charme de Baudelaire d'être pris par Vielé-Griffin, mais nous lui sommes reconnaissants d'y regarder de près et de trouver un certain charme, ne fût-ce qu'à le déchiffrer. Il parle de Bion, de Moschus, de Chénier ; il fait sur le vers-libre d'amusantes remarques, qui ne laissent pas d'être justes ; il s'y montre plus sensible qu'on ne le croirait.

" On peut dire qu'avec un instinct assez sûr, c'est quand la pensée qu'il a exprimée est moins " en clair " qu'ordinaire- ment, que M. Vielé-Griffin lui donne pour vêtement un rhythme flottant et agréablement indécis. Ceci, non pas toujours, comme j'ai dû à la vérité ou à ma franchise de l'indiquer, mais le plus souvent en somme et avec une adresse spontanée qui ne se trompe guère. "

Je ne donne point ce paragraphe comme un modèle de style ; mais la découverte ne manque par d'ingéniosité. Elle livre la clef des admirations et des incompréhensions lyriques de M. Faguet. M. Faguet nomme pensée " renonciation lo- gique d'un sentiment ou d'une idée ", " la pensée didactique " qui, en effet, appelle en vers l'alexandrin. J'ai dit plus haut qu'il fallait concevoir la pensée proprement lyrique comme invention, création de formes : or celle-ci M. Faguet l'a in- suffisamment reconnue en Phocas...

Pourtant je ne crois pas que lui ait tout à fait échappé la

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