Page:NRF 7.djvu/205

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

DANIEL DE FOE I99

brouillard et t'avait mené, un soir, à l'endroit du port où Giovanni Cabot s'était embarqué jadis. C'était le même accent, la même voix ; c'était le même sayon de poils de chèvre, le même accoutre- ment indéfinissable. Malgré toi, surpris au-delà du possible, tu jetas un oh ! d'étonnement. Mais, déjà, Watkins, empressé comme toujours, poussait jusqu'à toi le compagnon singulier, l'inimaginable visiteur dont tu pus enfin, de près, contempler le visage tanné, les yeux ardents et doux, la barbe longue et l'habit velu.

Alexandre Selkirk, tel était le nom de l'homme, de Foë, que tu avais devant toi. Il était né à Largo, dans le comté de Fife en 1676. Il était Ecossais. Parti avec des boucaniers dans les mers des Indes, il lui était arrivé, dans sa jeunesse, de participer à des aventures maritimes difficiles. Selkirk n'avait pas trente ans qu'il était déjà un marin rompu à tous les dangers, disposant d'un passé fertile en épisodes ; mais, sa carrière, si elle se fût limitée à ces voyages, n'eût pas présenté un intérêt beaucoup plus grand que celle de milliers et de milliers d'autres marins qui s'en vont vers les continents, au hasard des navigations. Ce n'est que lorsqu'il eut atteint la trentaine, que Selkirk, revenu en Angleterre, fit la connais- sance du capitaine Stradling, lequel le prit comme maître à bord du navire les Cinq Ports. Le capitaine Stradling était d'humeur hargneuse ; et ce n'était

�� �