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LA FÊTE ARABE 423

gâteau monté fait de chocolat et de moka, avec des parties blanches de crème à la vanille et d'énormes choux-fleurs de couleur angélique ; des lions en zinc d'art en défen- daient l'entrée : c'était l'Hôtel de Ville. De chaque côté, deux bâtisses : une église et une mosquée. Mais, phéno- mène inexplicable, la mosquée servait d'église, et l'église de marché couvert.

Dans un coin de cette place, je découvris mes porteurs qui m'attendaient, assis sur mes bagages, devant un charmant édifice, dont les murs dégradés et les fenêtres en ogives, flanquées de contrevents verts, ©vivaient jusqu'à la nausée l'impression de dégoût et de tristesse qu'on recevait ici de partout. Des colonnades brisées lais- saient pendre des terrasses comme des plafonds qui s'écroulent, des tuiles plates couvraient maintenant ce qui avait été des coupoles, des stucs gardaient encore dans leur fine dentelle des vitraux à demi-brisés, et le minaret, où l'on avait enfoncé une abominable horloge, était souillé du haut en bas par la fiente des pigeons.

Pour mettre le comble à ma stupeur, je vis venir à moi, sous la voûte, Benvenuto Mammo. Je le reconnus tout de suite à ses yeux larmoyants et à son doigt coupé. Lui aussi me reconnut et manifesta bruyamment son plaisir de me revoir.

Tandis qu'il me parlait, je regardais la cour. Elle avait dû être exquise, cette cour, autrefois, avec ses faïences et ses dalles, aujourd'hui en morceaux, et qui laissaient partout des trous noirs dans les murs, sa vasque où crou- pissait l'eau bleue d'une lessive, et son cloître à colonnes où couraient, en se mordillant la queue, les affreux cochons noirs qui semblaient devenus les vrais maîtres du lieu.

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