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NOTES 893

provoquer cette invention, pour faire surgir ce dessein. Or les Cubistes prennent leurs principes comme source d'inspiration ; ils les chargent d'imaginer à leur place, de jouer le rôle de la fantaisie qui leur manque. De là cette invention mécanique, bête comme un syllogisme, et ce fonctionnement à vide de la création qui produit à chaque instant n'importe quoi, simple- ment parce que cela résulte d'un n'importe quoi pris comme prémisse.

Mais pourquoi ne parler que des Cubistes ? En somme dans ce Salon ils sont peu nombreux ; leur bataillon n'est pas aussi compact qu'au dernier Salon d'Automne ; leurs toiles voisinent avec beaucoup d'autres toiles moins aggressives, plus sensibles.

Hélas ! les Cubistes sont déplorables ; mais tout ce qui les entoure est mort-né. Le malheur pèse sur la peinture contem- poraine ; notre admiration est prise dans un dilemne où il faut qu'elle étouffe. Ou bien nous pouvons aimer des artistes harmonieux, pondérés, habiles et délicats comme Friesz, Girieud ou Marquet ; mais ils fleurissent dans l'ombre du passé ; leur équilibre ils ne le créent pas eux-mêmes, ils l'empruntent tout fait aux grands maîtres ; ils ne se tiennent debout que parce qu'ils n'avancent pas. Ou bien il nous fait choisir ceux qui avancent ; mais ils ont une démarche d'estropiés.

Si dans ce Salon les envois de Metzinger ne me donnaient, par des qualités certaines de couleur et par un soupçon d'intel- ligence, un frêle espoir, si je ne trouvais de quoi me plaire dans la noblesse amère et forte et dans la souveraine élégance de Dunoyer de Segonzac, si je ne sentais la bienfaisante confiance que continuent à m'inspirer, encore que toutes leurs toiles ne soient pas ici d'une égale qualité, André Lhote et De La Fresnaye, je penserais qu'après le merveilleux XIX« siècle, le moment est venu, pour ceux qui aiment la peinture, de se décourager définitivement.

J. R.

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