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I088 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

patiner, d'un pied chaussé à la poulaine, sur un plancher de transatlantique. — Ici, les natures-mortes sont voilées de crêpe... Le salon d'Automne est tout de même le seul où l'on soit encore capable de jouer, de s'amuser, de courir... et, peut-être, de plaisanter,

Pour mettre en fureur les gens graves.

Graves, graves, graves Et pour amuser les enfants

Petits, petits, petits, . .

Comme dit Charles Cros. Et ça embête les grincheux qui pestent et qui crachent entre leurs genoux en lisant la Patrie à la terrasse de leur café d'habitués...

Tout le monde, ou presque, y a quelque chose à dire. Mais il y a là comme ailleurs les gens calmes et les rageurs. — De temps à autre, au-dessus d'un horizon de paysage furieux, tordu comme une serviette, on voit pointer les chantiers, les démolitions et les carrières cubistes.

Je vais tout de suite aux dessins de Maxime Dethomas, d'un beau mouvement plein de force et d'élégance, d'un goût sobre. Je les connais bien. Je sais que je vais les revoir avec un plaisir complet, toujours nouveau. Quand je me retourne, après les avoir longtemps regardés, je me sens attiré et comme caressé par quelque chose de puissant et doux qui rayonne non loin de là. Ce sont les sculptures de René Carrière. La lumière y glisse comme sur un Chardin : C'est traité comme par un peintre, avec des modelés ténus qui passent doucement les uns dans les autres. Mais elles font penser d'abord à des paysages, à un vallon- nement aux courbes subtiles, à une chose qui vit en plein air, à la belle étoile ; à une chose travaillée par la nature et paisible- ment amenée au point par elle. Une pierre longtemps éclairée par les astres. Un rocher poli et creusé par les eaux courantes, un visage par les larmes, un bel objet usuel par le toucher de tous

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