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150 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Le roi lui est tout. " Si, parlerons de nostre saint roy, sanz plusT Saint Louis est unique, et Joinville ne l'est pas moins. Mais que penser de ce saint royaume, où Joinville sert un tel roi, et où le roi, sans rien exiger, est servi d'un tel Joinville ? Les peuples remettent leurs causes entre les mains de ce monarque, et ils attendent son jugement. 11 est si près de Dieu, qu'il passe pour la même justice.

Solon, qui est si beau dans ses vers et dans Hérodote, paraît bien petit près de ces deux chrétiens sans tache. 11 est sec et clair, il est admirable en sa ligne, comme les rochers de l'Attique. Il n'a pas cette générosité profonde, cette abondance de l'âme, cette source sous bois, ce trésor dans le sol, qui jaillit de Joinville et de son roi, quand le fer de l'action touche ces cœurs où s'est enfin gonflé le fruit de la bonté humaine. Les Grecs sont un peu étroits.

Tous les deux, le roi et son chevalier, tant qu'ils peuvent, ils ne se quittent pas. Ils couchent par- fois dans la même chambre. Ils mangent à la même table. Ils s'entretiennent sans témoins. Non rarement, saint Louis prend à part Joinville, et le fait demeurer près de soi, jusqu'à ce que les princes et les grands du conseil aient quitté la salle. Ils sont tout seuls. Et Joinville, cet homme de guerre magnifique, est assis aux pieds du roi. Saint Louis se plaît à l'y voir. Et bien souvent, il

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