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LE MATADOR DES CINQ VILLES 295

Knype devait jouer avant la fin de la saison, et ces chiffres

indiquaient les succès qu'ils avaient remportés sur d'autres terrains pareils à celui-ci un peu partout en Angleterre. Si un but était marqué à Newcastle ou à Southampton (qui est le véritable Eldorado du football de premier ordre), ce but était enregistré sur ce tableau et sa répercus- sion possible sur les destinées de Knype était aussitôt fixée. Les calculs qu'on faisait étaient vertigfneux.

Ensuite, une petite troupe de pigeons prit son vol et se dispersa, avec l'illusion qu'ils étaient les libres maîtres de l'air, mais en réalité lancés, sur les énormes vagues atmosphériques des acclamations qui duraient encore, vers des destinations déterminées.

Au bout d'une minute ou deux, le ballon était relancé, et le grand bruit s'était rabaissé jusqu'à ce murmure sensitif et inquiet qui répondait, comme un instrument délicat, à toutes les fluctuations du jeu. Chaque exploit et chaque manoeuvre de Knype provoquait de généreux applaudissements proportionnés à leur intention ou à leur réussite, et chaque ruse des Pirates de Manchester, qu'elle réussît ou échouât, provoquait une sainte aversion. Les sentiments de l'armée étaient passés du domaine de la morale dans celui de la religion.

Puis, encore une fois, alors que mon attention s'était écartée du terrain, une vocifération infernale, sauvage, assourdissante, jaillit de quinze mille cœurs indignés. J'en frémis ; j'en fus réellement effrayé. Involontairement je fis le mouvement d'avaler. Le coup de tonnerre de cette colère fut suivi du mince bruit d'un sifflet. Le jeu s'inter- rompit. J'entendis les mêmes mots répétés de toutes parts et sur tous les tons d'une fureur au paroxysme :

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