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LES ROMANS 7II

petite histoire sentimentale. Comme deux oiseaux dans deux couches d'air animées de mouvements différents, ces deux amants étaient séparés par les forces de la nature. " Ces

    • grands courants " dont parle M. Bidou, c'est " cette curieuse

évolution qui a ramené aux sciences expérimentales, au roman et à la critique les poètes lyriques de 1890, et qui a fait naître la Reviu des Idées. " De l'idéalisme, René Auberive, comme la plupart des jeunes intellectuels de sa génération, revient à la science. " Réglant son esprit au pas de ses pairs, il aima l'expé- rience et admira la vie, mère de toute beauté. " Il lut des traités arides. Ces études et le cours de l'expérience modifièrent les idées qu'il se faisait de la vie. Tous ses goûts changèrent. " Il avait aimé passionnément la peinture... de Bume Joncs... Un jour, chez des amis, il entendit Maurice Denis exalter Fragonard. Cette parole pénétra vivement son esprit et y germa avec force. Il sentit en lui de secrètes et neuves connivences à cette idée. Le XVIIP siècle lui parut soudain admirable pour la souplesse et la vérité animée avec quoi il a exprimé l'ingé- nuité de la vie. *' Dans le même temps, il lut la Physique de r Amour de M, de Gourmont. Mais, surtout, " entre mille, " un article de revue " déshonora à ses yeux le plus pur amour. '* " Il y apprit que des passions comme celle de Dante ou celle de Saint-Preux, mères augustes des chefs-d'œuvre, ne dépendent même pas des parties supérieures de l'écorce cérébrale, mais des centres polygonaux : de sorte que, siégeant dans ces régions inférieures, elles peuvent être guéries par l'hypnose, par exemple, tandis que même une misérable crise d'hystérie, supé- rieure en dignité, ne le peut être. " — " Tel fut René, ajoute M. Bidou, dans cet été de 1894... Il dépouillait de jour en jour l'affection, la délicatesse, et les charmes de la subtilité, pour se faire un cœur solide. Son écriture même devenait plus nette, moins ornée et plus franche. — Marie, qui ne subissait point la même influence, et dont l'esprit était à jamais formé, gardait son charme inconsistant... et le lyrisme du cœur. "

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