Page:NRF 8.djvu/976

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

968 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

soupir immense ; de l'autre, un frissonnement dans d'opaques ténèbres.

Que de soirs j'ai marché ainsi entre la mer et la forêt, sous cette troisième obscurité, de toutes la plus lointaine : l'obscurité du ciel serein qui se dilate à l'infini !

L'inclinaison des astres sur le vaste horizon circulaire semblait rendre perceptibles à la vue leurs mouvements silencieux, comme un pied suspendu, immobile, peut donner aux yeux l'illu- sion de la danse.

Ce qu'on nomme ici-bas l'amour m'apparut alors dépouillé, dans sa simplicité redoutable.

Le sentiment comptait pour peu de chose dans les oscillations de ces balances sublimes.

Que pèsent, en face de l'éther, de ce globe oculaire aveugle, illimité, les regards noyés de tendresse ?

La voix du cœur était sans portée, comme une plainte que nul n'écoute, comme un grelottant tireli d'alouette sur la blancheur des flots d'au- tomne.

Seul, l'instinct, l'instinct pur et nu, emplissait de son large cri le désert éternel.

Comme une force de la nature parmi ses grandes sœurs, la Vénus humaine entrait dans la ronde.

Son sourire cruel gardait tout son sens, mais les seules larmes admises étaient celles de la volupté.

�� �