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les conquêtes du commandant belormeau

petit brin de curiosité puérile, elle fut prise d’un très vif désir de connaître son hôte, sans qu’il le sût évidemment. Elle y songea, pendant ses longues heures de solitude, solitude que faisait, plus complète, la défection de Vicomte, mais elle n’osait avouer son désir à Benoîte, qui se fût étonnée, à bon droit, de ce changement dans sa ligne de conduite. À force d’y songer, Mlle Herminie trouva le moyen de satisfaire son envie.

Justement, Benoîte, lui dit, ce matin-là, avec la familiarité pleine de sollicitude qui avait, peu à peu remplacé dans ses discours, les formules protocolaires :

— Mademoiselle va être seule comme une recluse toute la matinée, il faut que j’aille au marché, puis je veux faire des croquettes de pommes, vous ne me reverrez pas avant le coup de onze heures.

— C’est bon, ma fille, répondit Mlle Herminie qui avait, habituellement, la résignation moins facile avec mon tricot et mon livre d’heures, je ne m’ennuierai point.

La vieille demoiselle avait une autre distraction en perspective, qu’elle ne mentionna point.

Quand elle eut entendu la porte de la rue se refermer sur la servante et les sabots de celle-ci s’éloigner en claquant, sur les pavés pointus, Mlle Herminie avec l’émoi d’une conspiratrice, se leva, jeta un châle sur ses épaules et ouvrit une porte de communication. Puis elle se rendit dans un cabinet de débarras où l’on entassait les vieilles gazettes et les vêtements hors d’usage. Cette petite pièce prenait jour sur le jardin par un œil-de-bœuf.

On venait si rarement dans ce cabinet qu’il exhalait une âcre odeur de moisissure et de vieux papiers et que la vigne-vierge qui, au dehors, escaladait la muraille, avait eu tout loisir d’étendre son lacis de branches devant l’étroite fenêtre.