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les conquêtes du commandant belormeau

famine, il ne pouvait espérer être reçu par sa noble paroissienne avant un an révolu.

Quant à maître Delapierre, le notaire, quoiqu’il fût vieux, cassé, perclus de rhumatismes et pourvu d’un naturel austère et chagrin, parce qu’il était du monde, le rite se montrait pour lui plus sévère.

Il venait, à la Saint-Martin, rendre ses comptes à la cliente dont il administrait les biens et percevait les fermages, et il était tenu de s’asseoir devant une table si large qu’il lui fallait tendre le bras jusqu’à se démettre l’épaule, pour déposer ses paperasses entre les mains fluettes de Mlle de Batanville.

Le tabellion, quoi qu’il eût à narrer, n’avait droit qu’à trois quarts d’heure d’entretien. Après cela, s’il lui restait quelque chose à dire, il le devait garder durant l’année entière.

Cette intransigeance avait fait, à Mlle Herminie, un ennemi redoutable en la personne du maire de Wattignies. Celui-ci, Blaise Faverger, simple tonnelier, âpre travailleur, ambitieux et madré, avait toujours rêvé d’être à la tête de ses concitoyens. Sa posi­tion modeste, son manque d’instruction et la vulga­rité de sa femme, paysanne rustaude qui faisait claquer ses sabots et n’entendait que le patois, avaient longtemps semblé rendre ce rêve impossible ; les habitants de Wattignies, épris de prestige, ayant toujours choisi leurs officiers municipaux parmi les nobles ou les gros commerçants de leur ville.

Le tonnelier, homme patient, n’était point bête et tout en fonçant ses barriques, il avait déjà accou­tumé ses pratiques à cette idée qu’il pourrait, un jour, être leur maire et s’en tirer tout comme un autre.

La place, justement, venait d’être rendue vacante par la mort de son titulaire, le marquis de Vandremont, et la voix publique désignait, pour le remplacer, l’un ou l’autre des frères Stenneverck, l’un