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les conquêtes du commandant belormeau

filateur, l’autre brasseur, tous deux hommes de bon sens, de mérite et possesseurs d’une belle fortune arrondie de père en fils en d’honnêtes et profitables affaires.

Mais il advint que les sympathies pour les frères Stenneverck se montrèrent si nombreuses et si vives, qu’il apparut impossible de les départager et que ceux-ci redoutant, par-dessus toutes choses, que cette rivalité politique inattendue, ne vînt à troubler leur parfaite intimité, refusèrent, l’un et l’autre, l’honneur qui leur était fait.

Les habitants de Wattignies, tout désorientés, n’ayant personne sous la main, se rabattirent sur Blaise Faverger ; ils n’eurent, au reste, pas à s’en repentir ; car le bonhomme, s’il n’était pas brillant, était plein de sens pratique et d’une parfaite intégrité.

Un peu grisé par cette élévation tant souhaitée, le tonnelier modifia sa tenue. Il quitta son tablier de toile bise et la casquette de peau de lapin qu’il affectionnait aux jours d’hiver, pour revêtir un habit de drap safran à boutons de corne, un chapeau haut de forme en feutre gris et, ainsi vêtu, il entreprit une tournée de visites.

Mme la mairesse, qu’il sentait ne pouvoir élever à tant de hauteur et qui, d’ailleurs, n’y tenait guère, resta aux soins de son ménage.

En dépit de son air assuré, Blaise Faverger n’était point à l’aise au moment de se présenter dans les maisons riches dont il n’avait jamais franchi le seuil.

Pour se donner du cœur, il se rendit d’abord chez Michel Stenneverck, le filateur, puis chez son cadet, François, le brasseur.

Il y fut reçu avec simplicité et bonhomie. Mme Michel lui offrit de l’eau-de-vie de genièvre et Mme François de la liqueur de prunelles. Dans l’une et l’autre maison, on s’entretint des affaires de la commune ; le nouveau maire avait à cœur de les mener à bien ; les hôtes