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les conquêtes du commandant belormeau

d’auberge… Avec Minna, il ne sortit point des plates-bandes.

— Alors, commandant, vous faites des gerbes ?

— C’est cela ; des gerbes de souvenirs poétiques et tendres !… Ah ! si vous le permettiez, vous seriez une très jolie fleur à joindre à ma sentimentale cueillette.

— Je tiens à demeurer sur ma tige.

— Vous êtes une petite rose sauvage.

— Vous savez, alors, qu’elles sont bien pourvues d’épines.

— Vraiment, ne me donnerez-vous pas un léger souvenir des instants charmants qu’il m’est permis de passer près de vous ?… Une boucle de vos cheveux d’or ?

— Par exemple, commandant ! Je tiens essentiellement à tous mes cheveux.

— Ce ruban qui palpite à votre corsage ?

— Vous le voyez mal ; il est élimé.

— Ce dé d’argent qui scintille à votre doigt ?

— Mon dé ! Quelle demande outrecuidante ! Il me fait trop grand besoin et je ne me pardonnerais pas de le remettre entre vos mains oisives.

— Je vois bien, dit le commandant, d’un air de très sincère regret que, sous votre air riant, vous êtes une petite personne bardée de fer.

— Et je m’en flatte, commandant.

— Mais vous ignorez la vie… Ah ! si mon séjour ici se prolonge, je veux trouver le défaut de votre cuirasse… mademoiselle Minna, je veux, je le jure !

Toute une armée de pieds se fit entendre dans le vestibule ; c’était Mme  François qui rentrait avec sa bande pourvue de sabots neufs ; son arrivée coupa en deux le serment du commandant et Minna ne sut pas quel moyen il comptait employer pour l’amener à résipiscence.

Les choses, quelquefois semblent prendre un malin plaisir à brouiller les affaires des hommes.