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les conquêtes du commandant belormeau

vaste exploitation agricole ; entre eux, beaucoup de terres étaient restées indivises, mais ils avaient leur habitation respective.

Par ce temps d’hiver, avec la neige épaisse qui obstruait les chemins, ces logis de garçons manquaient de confort et de charme ; et peut-être leurs propriétaires pensaient-ils que la présence d’une femme aimée et, plus tard, celles de bébés joyeux transformeraient heureusement la maison.

Pierre fumait sa pipe et rôtissait ses bottes, au milieu de ses chiens ; il avait le sourcil froncé et ne s’était point déridé depuis trois semaines.

Cœur excellent, esprit loyal, il avait, quelquefois d’invincibles et inexplicables entêtements ; or, il avait mis dans sa blonde tête de Flamand qu’il ne ferait sa paix avec Minna que lorsque le commandant serait parti pour d’autres lieux.

Pierre songeait, justement, à sa rancune quand il reçut le message de François Stenneverck.

Très étonné, le jeune homme en prit connaissance, en devenant rouge jusqu’aux oreilles ; puis bousculant ses chiens qui n’y étaient pour rien, il sauta sur sa plume et écrivit :

« Cher M. Stenneverck, je vous suis bien reconnaissant et je vous reste attaché comme un fils ; mais je sais que Minna ne m’aime pas ; je ne saurais donc donner suite à nos projets et je lui rends sa liberté.

« Croyez que je n’oublierai jamais les bontés dont vous m’avez comblé, vous et Mme Stenneverck. »

Sans relire cette missive qui avait toujours le mérite d’être énergique et courte, Pierre la cacheta et la remit au domestique du brasseur ; puis il revint au coin de son feu avec une irrésistible envie de pleurer, comme un gamin, mais bien résolu à se faire couper la tête plutôt que de rien changer à sa résolution.

À la même heure, Philippe se tenait également