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À LA HACHE

Inutile de dire que Cailleron et Jeanne sont gâtées. Dois-je les plaindre ? Non. Elles y gagneront à bien connaître ces futurs rois de la ferme, qui apprennent la justice, le devoir et l’amour, au livre ouvert de Dieu, par la forêt.

Chantecler boude. Il n’est pas jaloux. Mais l’audace des bûcherons qui violent les poulaillers ! Le mal serait moins grand si les voleurs avaient la décence d’attendre que les œufs blancs et bruns soient refroidis, avant de les ouvrir et en boire le vivifiant liquide au nez… des poules même, lesquelles ne savent quoi penser.

Aussi, le coq se venge. Il sait que la plupart des dormeurs rêvent toujours à la promise qu’ils viennent de quitter. Alors, juste au moment où l’aube commence à tracer des sourires sur les érables avec son fusain rose, Chantecler menaçant, collette sur les tentes, et claironne.

— Coco chaud… Il fait beau… co… co… ri… co !

Les hommes s’éveillent en pétant. Et furieux, désabusés, ils répondent :

— Ah ! l’maudit coq !

La cuisine ne dérougit pas. Que dire des poêles ? Desrochers, O’Neil et Morissette tripotent la mangeaille, d’un soleil à l’autre.

Partout, dans la cour, les meules tournent.