Page:Narrache - Jean Narrache chez le diable.djvu/62

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mère, la France et l’Angleterre ; toujours prêt à se saigner à blanc pour toutes les sacro-saintes causes qui enrichissent les financiers de la rue St-Jacques. »

— « Ah ! bon ! ajouta le diable. Je te comprends mieux maintenant. Je vois pourquoi les Canadiens français ont été obligés de s’enrôler… volontairement, pour sauver l’Empire en 1914. »

— « Oui, mon vieux ! Et après que tant de milliers des nôtres y ont laissé leur peau, il n’y a plus d’Empire aujourd’hui. »

— « Et, en 1939, continua le diable, les Canadiens français sont allés sauver la démocratie. »

— « Et… il n’y a plus de démocratie ! »

— « Mon pauvre vieux ! Demande-toi donc si la démocratie a déjà existé hors des livres qui en traitent, » ajouta le diable.

— « En tout cas, les Canadiens français peuvent se faire à l’idée d’une prochaine guerre. Vois-tu, s’il n’y a plus d’empire, ni de démocratie, il y a encore des financiers. »

— « D’après ce que je peux en conclure, tu n’as pas l’intention de devenir politicien ou financier, mon vieux », me fit remarquer le diable.

— « Non ! Et je fais mienne la réflexion cruelle et pleine d’ironie du bon vieux Montaigne : « Le bien public requiert qu’on trahisse et qu’on mente et qu’on massacre ; résignons cette commission à gens plus obéissans et plus souples. »

— « Mais si vous êtes si mal gouvernés, n’est-ce pas votre faute après tout ? J’ai souvent entendu répéter cette phrase : « Les peuples ont le gouvernement qu’ils méritent ».

— « Et moi, je te dirai que, dans notre cher pays, nous avons le gouvernement que la haute