Page:Nau - Force ennemie.djvu/141

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Deux hommes à têtes de forçats passés mouchards poursuivent, dans une forêt, une vieille femme toute nue dont les longs cheveux d’un blanc sale battent les épaules et les reins ; des branchettes épineuses égratignent la peau grisâtre de la fugitive qui bondit, telle une maigre et minable chèvre, — qui fonce sur les halliers hérissés de piquants et de griffes, insensible à toute souffrance. Voici que des clairières succèdent aux fourrés ; la femme court droit devant elle plus vite et plus vite encore ; mais sur le sol tapissé d’herbe fine et courte, les poursuivants gagnent du terrain ; l’un d’eux allonge un bras, touche une épaule de sa proie qui se retourne et veut mordre de ses dents aiguës et blanches, singulièrement jeunes dans la face sabrée de rides. Mais le demi-succès de son compagnon a enragé l’autre molosse humain qui fait un effort sauvage, se jette en avant, désespérément, penché à tomber, les deux mains tendues, empoigne la chevelure blanche, perd l’équilibre, emporté par la furieuse lancée de sa course, s’abat, roule sur le corps de la malheureuse qu’il meurtrit de ses coudes, de ses genoux, de son ossature énorme. Les deux hommes à têtes de forçats exultent. Ils traînent sur le sol la forme saignante, puis l’étalant sur le dos, la souillent hideusement l’un après l’autre et comme la victime a encore la force de crier, ils la martyrisent à coups de poings et de souliers ferrés. C’est une loque humaine qu’ils emportent et jettent dans une sorte de fourgon… Le cheval s’éloigne au ga-