Page:Nau - Force ennemie.djvu/168

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n’a pas tremblé ; elle a débité son petit discours en prenant des temps, en détachant les syllabes, en « faisant un sort » à certains mots : dâhsolée, rêpêtable, funâhbre.

Quant à moi, mon insensibilité frise l’insolence. J’ai répondu de l’air le plus détaché du monde :

— Je vous remercie de vous être inquiétée de moi, ma cousine, mais cet établissement n’est pas triste du tout. Je me plais beaucoup ici. La maison est pleine de gens charmants.

Est-ce que je serais devenu un peu fou, à vivre dans ce milieu singulier ? Cela ferait l’affaire du bon Elzéar. Mais si je n’étais qu’un simulateur ?

Il s’agit de savoir avant tout si nous sommes « d’intelligence », sa femme et moi et il s’avise d’une épreuve un peu naïve.

— Oh ! mais, fait-il, que voici des cousins froids l’un envers l’autre ! Vous ne vous êtes même pas donné la main !

Là ! — Il va peut-être nous « pincer ». Une hésitation, une insistance, une étreinte des doigts trop longue ou trop brève, trop violente ou trop molle, va lui livrer les complices, si nous sommes des complices. Mais le « shake-hand » ne révèle absolument rien, — tout juste cordial, — un vrai shake-hand de cousins par alliance. Pourtant Roffieux ne parait aucunement tranquillisé. il est tout interdit. — tout bête. —

Bientôt, néanmoins, une nouvelle attisée d’énergie rallume de petites flammes dans ses yeux qui