Page:Nau - Force ennemie.djvu/296

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

comme il le dit lui-même, tremblent encore ; son vilain nez pourpre et ocre, qui ferait pâlir le drapeau espagnol, conserve un petit frémissement :

— Toujours sale type ! gronde-t-il. Vassetot a eu tort de lâcher un si détestable… blim bloum… poète. Déshonneur pour l’Art. Publierez des… machins, des bouquins, sale… mécanique !

Ses yeux de Mongol, si exigus, ont un vernis méchant (je ne dirai jamais une flamme en parlant de ces laides et minuscules taches brunes luisantes) ; mais il s’emballe :

— Moi jamais ferai paraître des… machines à 3 fr. 50 ou à moins. Cochonnerie ! Fabrique des vers pour moi tout seul, au besoin pour Magne et aussi pour deux bar-maids des Folies-Bergère. Trois seules personnes intelligentes que je connaisse ! Des vers, oh ! beaux et exquis ! Rimes ? Échos adoucis ; pas jeanfoutreries de rimes riches parnassiennes. Rimes riches ! ah ! Me font l’effet d’un… bloum ! d’un… coup de pied dans le cul ! Pas de mystère, pas de chose, pas de machin, tout ça des mécaniques, rimes riches, comme disait Baudelaire (!!?) qui avait le droit, lui (et il n’en abusait pas !), de rimer richement parce qu’il était LUI. — Ah ! rimes atténuées, pas trop continuelles, rappels lointains, étranges, saisissants, tristes, bleus, doux — exquis ! parfaitement oui ! pas mécaniques, pas blim bloum, absolument non !

Je ne puis m’empêcher de penser que ce maniaque habituellement idiot a cent fois raison avec son