mettez votre chapeau. Il n’y a pas de patères ici. Expliquez-moi le pourquoi de vot’ gracieuse visite, mon cher monsieur.
Le capitaine devient plus saccharin que le plus sucré des grogs :
— Capitaine, M. Bourdon m’a affirmé que vous m’admettriez à votre bord en qualité de pilotin.
— Ah ! mon enfant de garce ! Et vous n’avez pas honte, à votre âge !
Le capitaine se dessucre immédiatement. Il ne m’en envoie pas moins mon verre de grog avec un geste qui signifie : il est versé, il faut le boire !
— Mais, capitaine, M. de Fialligny a bien éfé pilotin à quarante ans et je n’en ai pas trente-cinq.
— Oui, il est légendaire dans la marine marchande, mais il nous a fichu là un bien fâcheux précédent. J’ai vu le moment où j’allais être obligé d’embarquer le Schah de Perse et le Roi Denis du Gabon. Qu’est-ce que vous fabriquerez à bord ? Vous ne savez rien f…
— J’apprendrai vite et j’ai de bons bras.
— Enfin ! Ça servira toujours pour « haler dessus ». Qu’est-ce qu’il vous demande par mois, M. Bourdon ?
— Deux cents francs à cause de mon âge avancé. Les jeunes, il les prend à moitié prix.
(Hélas, oui ! Je débarquerai à la Pointe-à-Pitre avec moins de cinq louis.)
— Deux cents francs ! C’est donné ! Vous savez qu’en chargeant un pilotin, l’armateur ne se con-