Page:Nerval - Élégies nationales et Satires politiques, 1827.djvu/123

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C’est ce que tu compris, quand riche d’une épouse
Des bords lointains du Cap, tu revins à Toulouse ;
Un si noble génie en France replanté
Ne pouvait demeurer en son obscurité.
Élu maire, bientôt l’amour de la patrie
S’éveilla, comme un songe, en ton âme attendrie,
Et ce beau sentiment l’échauffant par degrés,
Tu rêvas le bonheur de tes administrés ;
Leur bourse cependant étant fort aplatie,
Tu pelotas d’abord, en attendant partie,
Comme l’on fait toujours ; et de leur bien jaloux,
Tu voulus commencer par leur tâter le pouls[1].
Tu n’en eus pas le temps, car l’aveugle fortune
Te porta d’un seul coup au pied de la tribune,
Et fixant à la fois tes vœux irrésolus,
Te saisit au collet, pour ne te quitter plus.

Alors de mieux en mieux : bientôt le ministère
Ennoblit pour toujours ta race roturière ;
Avant toi sur ce siége un autre était assis,
Il partit, tu pris place ; — Allons, saute marquis !

C’est un grand pas de fait ; ministre ! quel beau titre !
Du bonheur des Français te voilà donc l’arbitre ;

  1. Quand j’aurai tâté le pouls à mon île, je te manderai s’il faut que tu viennes m’y joindre.

    (Lettre de Sancho à sa femme).