Page:Nerval - Aurélia, Lachenal & Ritter, 1985.djvu/101

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lorsque je sortis, une averse épouvantable tombait dans le jardin. Je me dis : — Quel malheur ! Toutes ces femmes, tous ces enfants, vont se trouver mouillés !… Puis je me dis : — Mais c’est plus encore ! c’est le véritable déluge qui commence. L’eau s’élevait dans les rues voisines ; je descendis en courant la rue Saint-Victor, et, dans l’idée d’arrêter ce que je croyais l’inondation universelle, je jetai à l’endroit le plus profond l’anneau que j’avais acheté à Saint-Eustache. Vers le même moment, l’orage s’apaisa, et un rayon de soleil commença à briller.

L’espoir rentra dans mon âme. J’avais rendez-vous à quatre heures chez mon ami Georges ; je me dirigeai vers sa demeure. En passant devant un marchand de curiosités, j’achetai deux écrans de velours couverts de figures hiéroglyphiques. Il me sembla que c’était la consécration du pardon des cieux. J’arrivai chez Georges à l’heure précise et je lui confiai mon espoir. J’étais mouillé et fatigué. Je changeai de vêtements et me couchai sur son lit. Pendant mon sommeil, j’eus une vision merveilleuse. Il me semblait que la déesse m’apparaissait, me disant : « Je suis la même que Marie, la même que ta mère, la même aussi que sous toutes les formes tu as toujours aimée. À chacune de tes épreuves, j’ai quitté l’un des masques dont je voile