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CHAPITRE premier

Une seconde fois perdue !

Tout est fini, tout est passé ! C’est moi maintenant qui dois mourir et mourir sans espoir ! — Qu’est-ce donc que la mort ? Si c’était le néant… Plût à Dieu ! Mais Dieu lui-même ne peut faire que la mort soit le néant.

Pourquoi donc est-ce la première fois, depuis si longtemps, que je songe à lui ? Le système fatal qui s’était créé dans mon esprit n’admettait pas cette royauté solitaire… ou plutôt elle s’absorbait dans la somme des êtres : c’était le dieu de Lucretius, impuissant et perdu dans son immensité.

Elle, pourtant, croyait à Dieu, et j’ai surpris un jour le nom de Jésus sur ses lèvres. Il en coulait si doucement que j’en ai pleuré. Ô mon Dieu ! cette larme, — cette larme… Elle est séchée depuis si longtemps ! Cette larme, mon Dieu ! rendez-la-moi !

Lorsque l’âme flotte incertaine entre la vie et le rêve, entre le désordre de l’esprit et le retour de