Page:Nerval - Le Rêve et la Vie, Lévy, 1868.djvu/291

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lutions politiques, etc… » Mais l’accessit était d’un avis bien contraire ; toute la poésie possible, à son sens, était contenue dans le grand siècle : au delà, rien que barbarie et confusion…, quelques épigrammes de Marot exceptées ; rien que l’on pût comprendre avant Ronsard, et quatre vers de lisibles, tout au plus, chez celui-ci (d’après la Harpe). Puis l’accessit tançait vertement ces novateurs rétrogrades qui veulent nous ramener à l’enfance de la poésie, nous proposant pour modèles des poëtes barbares qui n’avaient pas la moindre teinture des littératures anciennes, comme si les inimitables écrivains du siècle de Louis XIV n’étaient pas les seuls dignes d’être imités !

Travaillez, jeunes lauréats, travaillez ; il se peut que chacun de vous ait raison : que l’un nous offre des compositions où revive tout ce moyen âge qu’il dépeint si bien, que l’autre surpasse, s’il peut, les illustres modèles qu’il se propose… Mais qu’il les surpasse, entendez-vous ? car il est impossible d’admettre une littérature qui ne soit pas progressive. Regardez-y à deux fois : c’est une terrible prétention que celle de perfectionner Racine, et cependant la question est là.

Franchement, je vois chez le jeune novateur plus de conscience d’artiste, jointe à plus de modestie : il respecte trop nos grands auteurs pour se hasarder dans le genre qu’ils ont si glorieusement occupé ; il se propose des modèles moins supérieurs dans une littérature peu frayée, et qui n’a atteint aucune sorte de perfection : ces modèles, il peut sans trop d’orgueil espérer de les effacer, heureux s’il dotait notre siècle d’une source féconde d’inspiration et communiquait à d’autres l’envie de le surpasser lui-même dans cette entreprise.

Car il faut l’avouer, avec tout le respect possible pour les auteurs du grand siècle, ils ont trop resserré le cercle des compositions poétiques ; sûrs pour eux-mêmes de ne jamais manquer d’espace et de matériaux, ils n’ont point songé à ceux qui leur succéderaient, ils ont dérobé leurs neveux, selon l’expression du Métromane : au point qu’il ne nous reste que deux partis à prendre, ou de les surpasser, ainsi que je viens de