Page:Nerval - Les Filles du feu.djvu/284

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LA BOUQUETIERIE. Seigneur, je vends des roses, je vends des fleurs du printemps. Voulez-vous acheter tout ce qui me reste pour parer la chambre de votre amoureuse ? On va bientôt fermer le jardin, et je ne puis remporter cela chez mon père ; je serais battue. Prenez le tout pour trois carlins.

FABIO. Crois-tu donc que je sois attendu ce soir, et me trouves-tu la mine d’un amant favorisé ?

LA BOUQUETIÈRE. Venez ici à la lumière. Vous m’avez l’air d’un beau cavalier, et, si vous n’êtes pas attendu, c’est que vous attendez… Ah ! mon Dieu !

FABIO. Qu’as-tu, ma petite ? Mais vraiment, cette figure… Ah ! je comprends tout maintenant : tu es la fausse Corilla !… A ton âge, mon enfant, tu entames un vilain métier !

LA BOUQUETIÈRE. En vérité, seigneur, je suis une honnête fille, et vous allez me mieux juger. On m’a déguisée en grande dame, on m’a fait apprendre des mots par cœur ; mais, quand j’ai vu que c’était une comédie pour tromper un honnête gentilhomme, je me suis échappée et j’ai repris mes habits de pauvre fille, et je suis allée, comme tous les soirs, vendre mes fleurs sur la place du Môle et dans les allées du Jardin royal.

FABIO. Cela est-il bien vrai ?

LA BOUQUETIÈRE. Si vrai, que je vous dis adieu, seigneur ; et puisque vous