Page:Nerval - Les Illuminés, 1852.djvu/144

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Nicolas reçut une lettre anonyme qui lui donnait un grand nombre de détails sur la vie antérieure de sa future. La fatalité le poursuivit encore à cette occasion : il reconnut l’écriture de cette lettre pour celle d’une maîtresse qu’il avait eue à Auxerre à l’époque de son apprentissage, et l’attribua au dépit d’une jalousie impuissante. Le mariage se fit donc sans autre difficulté. Au sortir de l’église seulement, un sourire railleur commença à s’épanouir sur la figure couperosée de M. Parangon. Nicolas avait épousé l’une des filles les plus décriées de la ville. Les biens qu’elle apportait en mariage étaient grevés d’une quantité de dettes sourdes qui en réduisirent la valeur à fort peu de chose. Il devint bientôt clair pour le pauvre jeune homme que M. Parangon avait été instruit de ce qui s’était passé longtemps auparavant dans sa maison. Nicolas n’en eut la parfaite conviction que plus tard ; mais il avait fini par fuir le séjour abhorré d’Auxerre. Agnès Lebègue s’était déjà enfuie avec un de ses cousins.

Nicolas revint à Paris, où il entra chez l’imprimeur André Knapen. « L’ouvrage donnait beaucoup dans ce moment-là, » et un bon compositeur gagnait vingt-huit livres par semaine à imprimer des factums. Cette prospérité relative releva le courage de Nicolas Restif, qui bientôt écrivit ses premiers romans, parmi lesquels on distingua la Femme infidèle, où il dévoilait toute la conduite de sa femme ; plus tard, il publia le Paysan perverti, dans lequel il introduisit sous une forme romanesque la plupart des événements de sa vie.