Page:Nerval - Les Illuminés, Lévy, 1868.djvu/222

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Je crois que je prenais la détermination de le suivre, quand je me suis aperçu que mes deux souliers étaient en pantoufles ; je voulais m’arrêter et poser les pieds quelque part pour relever les quartiers de ma chaussure, quand un gros homme est venu m’attaquer au milieu d’une grande cour remplie de monde ; je lui mis la main sur le front, et l’ai lié au nom de la sainte Trinité et par celui de Jésus, sous l’appui duquel je l’ai mis.

— De Jésus-Christ ? s’est écriée la foule qui m’entourait,

— Oui, ai-je dit, et je vous y mets tous après vous avoir liés.

On faisait de grands murmures sur ce propos.

Arrive une voiture comme un coche ; un homme m’appelle par mon nom, de la portière :

— Mais, sire Cazotte, vous parlez de Jésus-Christ ; pouvons-nous tomber sous la puissance de Jésus-Christ ?

Alors, j’ai repris la parole, et j’ai parlé avec assez d’étendue de Jésus-Christ et de sa miséricorde sur les pécheurs.

— Que vous êtes heureux ! ai-je ajouté : vous allez changer de fers.

— De fers ! s’est écrié un homme enfermé dans la voiture, sur la bosse de laquelle j’étais monté ; est-ce qu’on ne pouvait nous donner un moment de relâche ?

— Allez, a dit quelqu’un, vous êtes heureux, vous allez changer de maître, et quel maître !

Le premier homme qui m’avait parlé, disait :

— J’avais quelque idée comme cela.

Je tournais le dos au coche et avançais dans cette cour d’une prodigieuse étendue ; on n’y était éclairé que par des étoiles. J’ai observé le ciel, il était d’un bel azur pâle et très-étoilé ; pendant que je le comparais dans ma mémoire à d’autres cieux que j’avais vus dans le capharnaum, il a été troublé par une horrible tempête ; un affreux coup de tonnerre l’a mis tout en feu ; le carreau, tombé à cent pas de moi, est venu se roulant vers moi ; il en est sorti un esprit sous la forme d’un oiseau de la grosseur d’un coq blanc, et la forme du corps plus