Page:Nerval - Les Illuminés, Lévy, 1868.djvu/300

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de Bucquoy, sur lequel je n’avais que des données vagues ou contestables, prend, grâce à cette pièce, une existence historique certaine.

Aucun tribunal n’a plus le droit de le classer parmi les héros du roman-feuilleton.

D’un autre côté, pourquoi M. d’Argenson écrit-il : « Le prétendu comte de Bucquoy ? »

Serait-ce un faux Bucquoy, qui se serait fait passer pour l’autre… dans un but qu’il est bien difficile aujourd’hui d’apprécier ?

Serait-ce le véritable, qui aurait caché son nom sous un pseudonyme ?

Réduit à cette seule preuve, la vérité m’échappe, et il n’y a pas un légiste qui ne fût fondé à contester même l’existence matérielle de l’individu !

Que répondre à un procureur de la République qui s’écrierait devant le tribunal : « Le comte de Bucquoy est un personnage fictif, créé par la romanesque imagination de l’auteur !… » et qui réclamerait l’application de la loi, c’est-à-dire peut-être un million d’amende ! ce qui se multiplierait encore par la série quotidienne de numéros saisis, si on les laissait s’accumuler ?

Sans avoir droit au beau nom de savant, tout écrivain est forcé parfois d’employer la méthode scientifique ; je me mis donc à examiner curieusement l’écriture jaunie sur papier de Hollande du rapport signé d’Argenson. À la hauteur de cette ligne : « Je continue de faire chercher le prétendu comte… » il y avait sur la marge ces trois mots écrits au crayon, et tracés d’une main rapide et ferme : « L’on ne peut trop. » Qu’est-ce que l’on ne peut trop ? — Chercher l’abbé de Bucquoy, sans doute…

C’était aussi mon avis.

Toutefois, pour acquérir la certitude, en matière d’écritures, il faut comparer. Cette note se reproduisait sur une autre page à propos des lignes suivantes du même rapport :