Page:Nerval - Les Illuminés, Lévy, 1868.djvu/413

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— Je vais, dit Sylvain, te dire le sujet d’une pièce que je voudrais faire sur la mort de Rousseau.

— Malheureux ! lui dis-je, tu médites des drames ?

— Que veux-tu ! la nature indique à chacun sa voie.

Je le regardai d’un œil sévère. — Il lut :


À LA CHEVRETTE


« Grimm apprend de sa maîtresse, madame d’Épinay, qu’elle est enceinte illégalement, et qu’il faut qu’elle présente une raison de santé pour s’aller cacher à Genève. Elle désire que Rousseau l’accompagne. Madame d’Houdetot, que Rousseau aime, se refuse à aider sa sœur dans l’exécution de ce projet. Rousseau refuse aussi. Aigreur, reproches, jalousie, etc. On le menace de dénoncer ses amours à Saint-Lambert, — de le chasser de l’Ermitage. Rousseau répond, et les accable. Il sort, les laissant conspirer sa ruine. »


À MONTMORENCY


« La neige couvre le sol. Rousseau, dans un pavillon ouvert, « sans autre feu que celui de son cœur », écrit sa lettre à d’Alembert. Il est plein de verve. Parfois, il chantonne la chanson des Spartiates, et apostrophe ses ennemis. Thérèse apporte son déjeuner, composé d’un peu de vin, de pain et d’eau. — Tandis qu’elle donne à un inconnu, qui l’embrasse à une fenêtre, du poulet et du vin de Bordeaux, Grimm vient réclamer Rousseau, expose comiquement tous les griefs de sa société, et finit par lui demander de la copie de musique. Rousseau se calme, et vante son talent dans ce genre. On apporte un paquet pour Thérèse de la part de la maréchale. Grimm félicite ironiquement le stoïcien des cadeaux qu’il reçoit. — Celui-ci se fâche, et proteste de son ignorance. Grimm se retire incrédule. Rousseau appelle Thérèse, l’accable de reproches : « Vous me déshonorez, etc. » Le libraire Duchesne entre, lui disant qu’il n’ose pas publier l’Émile, sans