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lide. Il se rendit à la Trappe, et chercha à observer cette loi du silence, si difficile à observer… Un jour, il se lassa de cette discipline, reprit son habit d’officier, et sortit de la Trappe sans dire adieu.

En route, il eut une querelle et fit une blessure à un homme qui l’avait insulté. Ce hasard malheureux le fit rentrer dans la religion. Il se crut obligé de se dépouiller de ses habits en faveur d’un pauvre, et ce fut alors qu’épris des doctrines de saint Paul, il fonda à Rouen une communauté ou séminaire, qu’il dirigea sous le nom de le Mort. Ce nom symbolisait pour lui l’oubli d’une douleur de la vie et le désir du repos éternel.

Cependant, il parlait dans sa classe avec une grande facilité, ce qui provenait peut-être d’une longue abstinence de paroles, éprouvée à la Trappe : de sorte que les jésuites voulurent l’attirer parmi eux ; mais il craignit alors que cela ne le mît trop en rapport avec le monde. »

II

LE FOR-L’ÉVÊQUE

Tels sont les antécédents qui, à Sens, auraient fait déjà quelque tort à l’abbé comte de Bucquoy, si le hasard ne l’eût fait confondre avec l’abbé de la Bourlie, fortement compromis dans les révoltes des Cévennes.

Ce qui aggravait surtout la position de l’abbé de Bucquoy, c’est que, dans sa voiture, on avait trouvé « des livres qui ne traitaient que de révolutions, un masque et quantité de petits bonnets, » et, de plus encore, des tablettes toutes chiffrées.

Interrogé sur ces objets, il se justifia, et son affaire prenait un assez bon train, lorsque, ennuyé du séjour de la prison, il eut l’idée de s’évader en mettant dans son parti les trente faux saulniers qui se trouvaient avec lui dans la prison de Sens, ainsi que certains particuliers arrêtés par divers motifs assez