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de l’abbé résolvait peu à peu toutes les difficultés. Falourdet déclara que ces moyens proposés avaient beaucoup d’apparence de pouvoir réussir, mais qu’il fallait de l’argent pour endormir la surveillance de Ru et de Corbé.

Sur quoi, l’abbé de Bucquoy tira, on ne sait d’où, de l’or et des pierreries, ce qui donna à penser que l’entreprise devenait possible. Il fut résolu que l’un fabriquerait des cordes avec une portion des draps, et des crampons avec le fer qui maintenait les X des lits de sangle et quelques clous tirés de la cheminée.

La besogne avançait, lorsque Corbé entra tout à coup avec des soldats, et se déclara instruit de tout. Un des prisonniers avait trahi ses compagnons… C’était l’abbé italien Papasaredo. Il avait eu l’espoir d’obtenir sa grâce au moyen de cette trahison ; il n’eut que l’avantage d’être mieux traité pendant quelque temps.

Tous les autres furent mis au cachot ; l’abbé de Bucquoy à l’étage le plus profond.

VII

AUTRES PROJETS

Il est inutile de dire que l’abbé comte de Bucquoy se plaisait peu dans son cachot. Après quelques jours de pénitence, il eut recours à un moyen qui lui avait déjà réussi en d’autres occasions : ce fut de faire le malade. Le porte-clefs qui le servait fut effrayé de son état, qui se partageait entre une sorte d’exaltation fiévreuse et un abattement qui le prenait ensuite et qui le faisait ressembler à un mort ; il contrefit même cette situation au point que les médecins de la Bastille eurent peine à lui faire donner quelques signes de vie, et déclarèrent que son mal dégénérait en paralysie. À dater de cette consultation, il feignit d’être pris de la moitié du corps et ne bougeait que d’un côté.