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LORELY

marguerite. Eh bien ! sa présence, vois-tu, în’esl souvent plus douloureuse encore que son éloignement !… Ah ! j’ai le cœur plein d’amertume et d’cnnuil… Étais-je née pour devenir l’épouse d’un ministre ? moi, pauvre femme, élevée dans la classe bourgeoise, et à qui l’on ne craint pas de le rappeler souvent !

diana. Que veux-tu dire ? N’aimes-tu pas ton mari ?… Je pensais que vous vous étiez unis par amour…

marguerite. Ah ! Diana ! l’amour pour de telles natures n’est rien qu’un caprice, une fantaisie ; le mariage n’est que l’accomplissement d’un devoir envers la société, et ne leur offre tout au plus qu’un repos passager à des ambitions plus dignes de les émouvoir… Est-ce assez pour une femme, Diana ? Et nepuis-je regretter de n’avoir pas confié le soin de mon honneur à quelque esprit plus humble, et moins préoccupé du bonheur de tous ?

diana. Prends garde ; tu t’es condamnée en avouant que la foi manque à ton cœur… Ah ! Marguerite !… la résignation est la plus grande vertu des femmes ; c’est l’amour d’elles-mêmes qui les perd, plus souvent encore que l’autre amour, et ceux qui les séduisent ne sont que les complices de leur orgueil !… Il en est tant parmi nous qui trouveraient ta position digne d’envie ! Ce repos dans le devoir, cet honneur dans le sacrifice, n’est-ce pas la vraie couronne que