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SCÈNES DE LA VIE ALLEMANDE.

le prince. À vous en séparer ?…

léo. Eh, mon Dieu ! monseigneur, n’est-ce point une séparation réelle que la vie que je mène… Croyez-vous que j’ignore ses chagrins… que je ne voie pas ses larmes ; eh bien ! j’ai sacrifié mon bonheur domestique à vos intérêts… je veux dire à ceux du pays ! Faites aussi vous-même le sacrifice d’un vain amour, et qu’on ne dise pas que c’est une femme hardie… instrument peut-être de quelques sombres intrigues anglaises, qui a guidé jusqu’ici vos sympathies pour la liberté… et qui les retient où il lui plaît !

le prince. Ah ! monsieur !… faites votre devoir de ministre, et ne vous mêlez pas de me juger : vous êtes allé trop loin ! Et vous, homme glacé, qui savez si bien froisser le cœur des autres avec votre main de pierre… rentrez donc aussi dans vous-même : peut-être aussi vous occupez-vous trop des choses publiques… regardez quelquefois dans votre maison. Votre femme est délaissée, dites-vous ? Les femmes belles comme la vôtre ne le sont jamais… Vous savez tout, dites-vous ? Apprenez donc une chose que je sais, moi : que je sais presque seul, et parce que je dois tout savoir 5 une chose, que je dois vous dire, parce qu’il faut qu’un ministre soit respecté dotons…

léo. Prince !

le prince. Oh ! nul n’accuse votre femme ! mais