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LORELY

notre maison : Marguerite ! nous nous y retrouverons seuls, et, je l’espère, tu oublieras ce que tu as souffert pendant le temps où nous l’avons quittée.

marguerite. Vois-tu, Léo, je ne crois pas à ce que tu me dis, et il me semble que je rêve… Si cela était… tu ne me parlerais pas avec une voix si triste et des yeux si abattus.

léo. C’est qu’entre aujourd’hui et demain, Marguerite… il y a un abîme : un abîme où je puis tomber en essayant de le franchir.

marguerite. Que me dis-tu, Léo !… As-tu quelque chose à craindre ? Cours-tu quelque danger ? Mon Dieu, mon Dieu, parle, réponds-moi ?

léo. Ah ! j’aurais dû me taire… j’aurais dû avoir la force de te quitter sans me plaindre ; mais je suis tellement abattu, tellement accablé… Ah ! j’en ai honte, vraiment !

marguerite. Me quitter ? Tu vas me quitter encore !

léo. Embrasse-moi.

marguerite. Écoute ; tu me fais peur ; parle.

léo. Non, Marguerite, non, il n’y a rien à craindre ; je suis fou de m’abandonner ainsi, sois tranquille ; songe que si je réussis cette nuit, demain nous sommes libres et heureux.

marguerite. Un danger, un danger… tout le monde me parle de danger !

léo. J’avais besoin de revenir à toi, de te presser